lundi 19 mars 2007

NON AU DÉTOURNEMENT DE L’ÉLECTION!

Aujourd’hui, à 16h, le gouvernement Harper déposera à Ottawa le budget de l’État Canadien. Stratégiquement placé une semaine jour pour jour avant l'élection au Québec, il est clair que ce budget visera à faire miroiter aux québécois des milliards, par ailleurs déjà payés par nos impôts, dans le but de démontrer les grands avantages du régime fédéral, dans le but de soutenir les partis fédéralistes québécois et de préparer la campagne fédérale qui suivra.

Court-circuitage de la démocratie
Ce soi-disant règlement du déséquilibre fiscal par le gouvernement Harper constitue la plus grosse « commandite » de notre Histoire, la plus grossière manœuvre pour court-circuiter la démocratie québécoise, pour manipuler l’opinion publique, pour acheter l’allégeance des Québécois avec leur propre argent. Une telle ingérence fédérale dans les affaires québécoises en pleine campagne électorale est du jamais vu.
Cela se fera bien sûr en ligne avec les intérêts partisans des trois leaders conservateurs. Harper prépare les gains qu’il souhaite au Québec pour obtenir un mandat majoritaire à Ottawa. Charest compte démontrer son efficacité comme bon sujet de l’État fédéral. Dumont attend ce budget pour finalement chiffrer ses promesses sorties du chapeau.
Un Gouvernement fédéral respectueux de la nation québécoise aurait attendu au moins une semaine après l’élection, plutôt qu’avant, pour déposer son budget. Nous dénonçons et nous combattrons cette tentative de mainmise de l’État fédéral sur la démocratie québécoise!

Une nation privée de ses choix budgétaires
Le gouvernement Harper a reconnu la nation-québécoise-dans-un-Canada-uni. Nous en comprenons aujourd’hui pleinement le sens. Le gouvernement de la nation québécoise est assujetti aux décisions d’une autre nation – la nation canadienne-anglaise – pour boucler son budget. Le «cadre financier» des promesses électorales de Jean Charest le fédéraliste et de Mario Dumont qui se dit «autonomiste» sera finalement défini par le «cadre financier» fédéral qu’il faudra quêter d’année en année, sans aucune garantie de succès.
Rappelons qu’entre 1993-94 et 2003-2004, les revenus fédéraux perçus au Québec ont augmenté de 58% et les transferts fédéraux de 5,8%. L’État fédéral a donc décidé, unilatéralement, de couper dans ses paiements de transfert. Cela lui a permis d’engranger des surplus faramineux pendant que les Gouvernements québécois, qu’ils soient fédéralistes quêteux ou fiers souverainistes, étaient étranglés financièrement, obligés de couper dans les secteurs vitaux de la santé et l’éducation.
On évalue à près de 3,9 milliards $ par année l’augmentation requise des transferts de nos impôts fédéraux au Gouvernement du Québec, simplement comme minimum pour rétablir les paiements de transfert à leur niveau antérieur. Le parti libéral se contenterait bien sûr de beaucoup moins pour passer le cap de l’élection, mais que le Budget Harper rétablisse totalement ou partiellement ses contributions à la Santé, à l’Éducation et à la péréquation, cela n’effacera jamais au Québec les 10 années de souffrances dont les malades et les jeunes du Québec ont fait les frais. Dans le fond, qu'est-ce qui nous assure que ce gouvernement ou un autre qui le remplacera, ne recommencera pas à recréer un autre déséquilibre fiscal dans un an ou deux comme le Gouvernement Chrétien-Martin l’a fait sans l’accord du Québec il y a quelques années?

Une nation assujettie à une autre nation
Nous n’acceptons pas de discuter de la question du déséquilibre fiscal dans le cadre des relations fédérales-provinciales! Dans ce cadre, le Québec est une nation assujettie à une autre nation. Une nation qui n’est pas libre de ses choix!
La souveraineté, la construction de l’État Québécois, est indispensable pour mettre en marche de véritables chantiers pour résoudre des problèmes de société intolérables et urgents comme la lutte à la pauvreté, le développement de l’emploi, les changements climatiques, le décrochage scolaire, la promotion du français et de la culture, le sous-financement de l’éducation et de la santé.
L’encadrement du pouvoir de dépenser du fédéral, dont on parle beaucoup comme autre planche de salut à Jean Charest, si cela était annoncé dans l’énoncé budgétaire, ne ferait qu’empêcher le Gouvernement canadien de dépenser dans des champs de compétences du Québec sans son accord. Cela pourrait ralentir la centralisation, mais ne donnerait aucun pouvoir à notre État national pour s’attaquer à nos problèmes de société.
L’enjeu de la présente élection au Québec dépasse largement le cadre d’un affrontement entre partis, entre chefs, entre équipes. Le gouvernement Harper la voit d’ailleurs ouvertement comme un tremplin pour sa prochaine campagne électorale avec comme arrière plan l’espoir d’une marginalisation du mouvement souverainiste québécois.
Nous invitons les québécois et les québécoises à résister à cette tentative de détournement de nos choix démocratiques, à se donner la chance de mettre fin définitivement, par la décision de construire de notre État national, à la centralisation des pouvoirs à Ottawa, à la minorisation du Québec au Canada et au déséquilibre fiscal qui confisque nos choix d’avenir.
C’est une décision qui n’appartient qu’aux Québécois et aux Québécoises!

Texte rédigé pour le Conseil de la souverainté et les Intellectuels pour la souveraineté (IPSO), paru dans Le Devoir du 16 mars 07

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