dimanche 10 décembre 2017

Fusion QS-ON: Pour un nouveau départ

Aujourd'hui Option Nationale est à la croisée des chemins. Il faut regarder l'entente de fusion avec Québec solidaire dans une perspective plus large que la simple question de l’existence ou non d’un véhicule politique.
Rappelons que n’est pas pour rien que les deux partis ont été créés depuis le référendum de 1995. Au cours des six élections québécoises qui ont ont suivi, le Parti québécois, principal véhicule souverainiste, a refusé de préparer et de tenir ses élections en assumant l’article 1 de son programme, en faisant une campagne indépendantiste. Cette fois, pour l'élection de 2018, c’est un engagement clair de pas tenir de référendum non plus. Cette dérive provincialiste fait en sorte que l’appui au parti québécois est descendu sous le seuil historique des 20%. La moitié des souverainistes votent pour d’autres partis ou ne votent pas. Cette stratégie suicidaire fait reculer notre option.
Et pourtant en 2016, les sondages montraient qu’une coalition des partis souverainistes obtiendrait un appui de 47% chez les francophones. Ainsi, une une alliance PQ-QS-ON aurait donné une majorité d'indépendantistes à l'Assemblée nationale, ce qui aurait permis d'entreprendre une démarche constituante pour résoudre la question nationale. Voilà la direction dans laquelle il faut aller.
La fusion fera-elle avancer l’indépendance ?
C'est la seule question qui importe. En fin de semaine dernière, le congrès national de QS a apporté des modifications substantielles à son programme, conformément à l’entente de principe avec ON. Ils ont livré la marchandise. Le parti unifié mettra résolument le cap sur l’indépendance. 
  • On y retrouve une démarche constituante claire vers l’indépendance qui implique l’adoption dans les plus brefs délais, d’une loi sur l’Assemblée constituante lui donnant le mandat d’élaborer un projet de constitution d’un Québec indépendant. 
  • Le programme de QS prône une démarche claire de rupture avec l’État canadien : « QS appliquera les mesures prévues à son programme, qu’elles soient compatibles ou non avec le cadre constitutionnel canadien »
  • Enfin, l’ensemble du programme de QS sera interprété comme un programme de pays, rompant avec l'approche provincialiste qu'il partageait avec le PQ jusqu'à maintenant.
Dans le parti unifié, ON ne disparait pas. Il devient un collectif politique doté d’un mandat, d'une structure organisationnelle, de ressources financières, de candidats à l’élection de 2018, de postes au sein du parti unifié, de la responsabilité d’une université sur l’indépendance, de la préparation de matériel de promotion de l’indépendance ainsi que d’une série de conférences de porte paroles d’ON sur l’indépendance.
 
Changer la dynamique
Cette entente possède un immense potentiel. Celui de changer la dynamique délétère vers le bas dans laquelle nous étions engagés jusqu’à maintenant. Séparés, nous faisons du surplace ou pire, nous reculons dans l’esprit des gens, encourageant la dispersion des causes dissociées d’un projet national d’avenir.
1.     Dans l’immédiat, l’entente amène un renforcement d’un deuxième pole indépendantiste, offrant une tribune plus large pour le programme et les idées d’ON, dans un véhicule de l’indépendance plus solidement organisé et financé. Ce pôle devrait pouvoir rallier, non seulement la majorité des membres d’ON, mais aussi ramener à l'action politique un grand nombre d’indépendantistes déçus ou démobilisés.
2.     Ensuite, pour l’élection de 2018, contrairement à l’option prise par le PQ, le parti unifié réalisera une campagne indépendantiste enclenchant une démarche constituante fondé sur la souveraineté du peuple, une approche d’avenir qui réussira tôt ou tard.  Si ce n’est pas en 2018, ce sera à l’autre élection.
3.     Après 2018, et peut être d’ici 2018 (qui sait), la fusion donnera un sérieux coup de pouce à une alliance plus large avec le Parti québécois, une entente que souhaite tous les indépendantistes, une entente absolument nécessaire à l’obtention d’une majorité à l’Assemblée nationale. Sans celle-ci, rien ne se fera. Avec elle tout devient possible.
4.     Enfin, le principal avantage de la fusion est de contrer la démobilisation,  la perte de l’espoir et la peur de l’échec qui empêchent l’idée d’indépendance de progresser et d’aboutir. Cette fusion est un antidote contre la peur et la perte de l’espoir.
 
Option Nationale, depuis sa fondation en 2011 a été une force agissante, un fer de lance de l’indépendance. Cette force ne tient pas à la structure de parti d'ON, mais à la vision, à la conviction à la détermination de ses membres. Ces qualités pourront s’exercer encore davantage au sein de l’union avec QS, et plus largement dans l’ensemble du mouvement indépendantiste.
Option Nationale a toujours affirmé clairement qu’il serait prêt à fusionner avec tout parti prêt à s’engager clairement pour l’indépendance. C’est le cas maintenant. Comme l’affirme le préambule de l’entente de principe : « une réconciliation des forces indépendantistes et progressistes est plus que jamais nécessaire pour réunir les conditions de notre sortie du régime canadien et rendre possible le projet de société dont le Québec a besoin. (…) Ce rassemblement ne peut se faire qu’autour d’un véritable programme de pays, affranchi des limites posées par le système politique canadien. »
Adopter l’entente de fusion, ce n’est pas la fin de l’esprit et de l’action d’Option nationale, c’est un nouveau départ.
C’est un départ vers ce qui nous motive tous, faire du Québec un pays.



dimanche 8 octobre 2017

Catalogne: Légalisme contre démocratie.

Beaucoup de commentateurs de la situation en Catalogne ont confondu allègrement légitimité et légalité. Le référendum catalan est illégal selon une Constitution particulièrement rigide, il serait donc illégitime. Ce faux raisonnement épouse la voie légaliste et dangereuse qu’a prise le gouvernement d’Espagne en niant le droit démocratique du peuple Catalan de choisir librement son statut politique. Cette thèse affirme en somme qu’il serait démocratique d’imposer par la force à tout un peuple millénaire jadis indépendant, les décisions d’une Cour constitutionnelle au service d’un pouvoir espagnol.

Tout a pourtant été essayé depuis 2010 pour trouver une aire de dialogue avec l’État espagnol dans le cadre de la légalité établie par Madrid. Depuis le retrait par la Cour constitutionnelle espagnole d’une partie importante de l’autonomie de la Catalogne, auparavant approuvée en Catalogne par référendum, et même par le Gouvernement espagnol socialiste de l’époque, les demandes répétées de rétablissement de ce statut d’autonomie ont toujours été rejetées du revers de la main par Madrid. C'est ce blocage systématique de l'État espagnol qui a forcé le gouvernement catalan à procéder unilatéralement par référendum, faute de pouvoir le faire de concert avec le gouvernement espagnol, comme ce fut le cas lors du récent référendum sur l’indépendance de l’Écosse ou, dans les faits au Québec, en 1980 et en 1995. En cela il a été appuyé par 70% de la population. 

73% des bureaux de scrutin ouverts le 1er octobre
(images prise à la télévision catalane, le 1er octobre 2017)
J’ai été témoin sur place le 1er octobre de la détermination des catalans à exercer leur droit de vote, malgré les accusations d’illégalité et les menaces de sanctions, une détermination démocratique, résolue et pacifique. Sous la pluie, j’ai vu de longues files d’électrices et d’électeurs, de tout âge, de toute condition sociale, attendant patiemment pendant des heures l’ouverture des bureaux de votes, retardée par les violences policières, par la saisie de boites de scrutin et de matériel électoral, par les attaques répétées sur les réseaux dans le but d’empêcher la communication des listes et des résultats électoraux. Sur 2300 lieux de votes environ 400 ont été bloqués par la police, empêchant plus de 700 000 personnes qui voulaient voter de le faire. Sans ces violences et ces exactions, la participation aurait probablement dépassé les 60% au lieu des 42% actuels.

On peut rappeler ici cette phrase de Louis-Joseph Papineau : « il n'y a d'autorité légitime que celle qui a le consentement de la majorité de la nation. Il n’y a de constitutions sages et bienfaisantes que celles sur l'adoption de laquelle les intéressés ont été consultés et auxquelles les majorités ont donné leur libre accord ». La Constitution espagnole n’est pas « sage et bienfaisante » pour les catalans. La démocratie, oui c’est l’État de droit, mais un État de droit respectueux et respecté, voulu et défini par les citoyens. En Catalogne le 1er octobre, l’État de droit était dans la rue en train de voter, contestant de fait la Constitution d’un État qui l’englobe à ses conditions et, désormais, contre son gré.

La violence, perpétrée par l’État espagnol revient à vouloir priver tout un peuple de son pouvoir démocratique, à l’enfermer pour toujours sous le joug d’une légalité qu’il récuse. Le seul choix consiste donc à établir une nouvelle légalité, une Constitution catalane, élaborée par une Assemblée constituante démocratique et adoptée par le peuple, par référendum. Malgré les différences entre nos situations respectives, en Catalogne comme au Québec, la démocratie passe par une démarche constituante fondée sur le pouvoir du peuple exercé librement. La pression internationale doit s’exercer en ce sens.

samedi 30 septembre 2017

Le peuple Catalan a gagné son droit à l’autodétermination.

À la veille du référendum catalan du 1er octobre, je termine une tournée des partis et des mouvements politiques Catalans, organisée par le réseau Québec monde. Hier soir se tenait un rassemblement unitaire monstre à la Plaça d’Espagna, aux pieds du mont Montjuic qui surplombe la ville de Barcelone. Ce rassemblement mettait fin à la campagne pour le Oui à l’indépendance. Bien malin qui pourrait prédire aujourd’hui le résultat, veille du vote de dimanche. Chose certaine, le vote aura lieu avec une solide participation de la population catalane.


Devant les actes autoritaires et antidémocratiques du gouvernement espagnol, décidé à empêcher le vote par tous les moyens et à nier la liberté d’expression (saisie de publicité, directives aux médias, fermeture de site internet), il y a une réponse admirable de la population : 80% affirment vouloir voter pour décider de leur statut politique même si Madrid a déclaré le référendum illégal. À titre d’exemple de la détermination des catalans, lors de l’arrestation le 20 septembre de 14 fonctionnaires participant à l’organisation du scrutin, les policiers n’ont pu sortir de l’édifice qu’après un long moment, bloqués par une foule de 200 000 personnes qui s’étaient mobilisés spontanément pour protester contre cette attaque aux libertés démocratiques.

Dans les faits, le référendum du 1er octobre n’est plus principalement un référendum sur l’indépendance mais un référendum sur le droit à l’autodétermination. Même des groupes ou partis non indépendantistes comme Podemos, recommandent de voter dimanche et donc de défier la légalité espagnole. En ce sens, les actes de Madrid ont eu pour effet de solidariser les catalans, au delà de leur différences d’opinion.


Tout ne sera pas réglé dimanche, mais chose certaine, le peuple catalan aura franchi une étape importante vers son émancipation. Il aura gagné dans les faits son droit à l’autodétermination même si les manœuvres policières ou politiques du gouvernement espagnol fausseront probablement les résultats. Les catalans eux-mêmes, et le monde saura qu’ils ont le droit de se donner un pays.

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